Ce sont les mots de Fio Piccolo, le jeune ingénieur aéronautique du film d’animation mythique de Hayao Miyazaki, Porco Rosso.

Cependant, alors que le film raconte une romance et des aventures aériennes dans la mer Adriatique, la vision qu’en a Miyazaki ressemble étonnamment à la mer japonaise de Setouchi.

Nous permettant de nous demander : « Ne serait-il pas parfait de pouvoir voler autour du Setonaikai, comme Porco Rosso ? »

C’est là qu’entre en jeu Setouchi Seaplanes, une startup chic de la ville d’Onomichi, qui propose des vols à basse altitude au-dessus de la mer intérieure de Seto en hydravion. Dont un avion décoré sous la supervision de Miyazaki lui-même – vous l’aurez deviné – pour évoquer l’avion emblématique de Porco Rosso. (Difficile de faire plus chouette, non ?)

Au moment-même où j’ai passé la porte de Setouchi Seaplanes, j’ai su que j’avais pris la bonne décision. Même l’entrée de la startup possède une ambiance chic et, disons, fuselé. Une fois à l’intérieur du lobby, décoré de modèles réalistes de leurs hydravions Kodiak 100 et de photographies des avions en vol, le message est clair.

Cet endroit est une émanation de la passion de l’aviation.Dieser Ort ist aus Liebe zum Flug geschaffen worden.

Un personnel amical nous dirige jusqu’au comptoir, et nous entamons l’enregistrement rapide, qui implique de se tenir sur une balance pour vérifier que notre poids soit bien celui déclaré au moment de réserver. Un élément nécessaire pour préparer le vol.

Une fois cela achevé, nous sommes récompensés dans la zone suivante par une sélection de jus de fruits pressés à la main, de chocolats et de délicieuses pâtisseries.

« Hmmm, ils devraient peut-être penser à nous peser après le bar à pâtisseries », me dis-je, tout en attrapant un gâteau au citron, une barre chocolatée, un cookie et un verre de jus d’orange frais.

Après nous avoir laissé un moment pour fausser les poids précédemment mesurés, nous nous dirigeons vers les quais où, après les consignes de sécurité, nous pouvons nous approcher du ponton où flotte tranquillement notre hydravion.

Monter à bord donne bien plus l’impression d’embarquer dans un navire que dans un avion. Mais les confortables sièges de cuir, les casques audios et les harnais sont un indice de ce qui nous attend bientôt.

Une fois que nous sommes tous à bord, avec nos harnais et nos casques, les pilotes prennent le relais après que l’un des membres du staff ait fermé la porte passagère, pendant qu’un autre libère les amarres. Les pilotes démarrent et nous naviguons doucement vers le large.

Déjà le voyage est passionnant, avec cette sensation nouvelle d’être mené sur l’eau au turbopropulseur, tout en admirant la vue superbe de la fenêtre (car il faut bien le reconnaître, la mer intérieure de Seto est superbe quel que soit la hauteur du point de vue). Mais l’excitation est aussi palpable, attendant tous que le pilote ne mette les gaz pour nous emmener en l’air.

Finalement, le moment arrive, et le moteur rétro tremble jusqu’à émettre un grognement continu. L’hydravion s’élance avec autorité, et un filet d’eau est finement projeté de chaque côté alors que nous accélérons entre les vagues. Subtilement, les sensations passent du speed boat à un glissement agréable, au moment où nous quittons finalement l’eau pour nous élever dans le ciel.

Je réalise alors que le casque audio est directement connecté au micro des pilotes, leur permettant de nous donner des informations sur les nombreuses îles et points d’intérêts qui défilent sous nos yeux. Mais pas seulement. Ils sont en fait directement connectés avec les fréquences aéronautiques, nous permettant d’écouter les communications entre nos pilotes et le sol, tout au long du vol.

Ce simple détail de la part de Setouchi Seaplanes permet une immersion encore plus grande, comme si nous étions parties prenantes du vol et pas seulement des passagers en goguette.

Un voyant s’allume, avec un message d’alerte quand le l’ordinateur de bord détecter une montagne sur notre trajectoire. Mais il n’y a pas lieu de s’inquiéter, les pilotes entamant un arc léger qui signifie le début de notre balade aérienne, en forme de « 8 ».

Nous restons à basse altitude – sans toutefois effleurer les vagues ! – et aux environs de 700 mètres au-dessus de la mer, soit plus de dix fois plus bas que ce vous pourrez jamais essayer via des vols commerciaux. Ce qui nous offre le meilleur point de vue sur la magnifique mer intérieure de Seto.

Le panorama ressemble presque à une maquette, et le capitaine de bord nous présente chaque île en anglais et en japonais, tout en nous donnant les clés pour comprendre l’histoire locale.

L’océan d’un subtil bleu-vert caresse les franges sablées des îles de Setouchi, qui s’élèvent ensuite en une forêt d’un beau vert foncé. Quelques filets nuageux nous invitent à aller plus loin, comme la promesse muette d’une nouvelle aventure.

Le vol dure 50 bonnes minutes, nous faisant découvrir les îles et les ponts de la route Shimanami Kaido – également une superbe piste cyclable, elle-aussi accessible depuis Onomichi. En fait, je dirais même que le « Setouchi Discovery Flight », proposé par Setouchi Seaplanes, est le complément parfait d’une virée à vélo sur la mer intérieure. Soit comme récapitulatif du chemin parcouru, ou comme bande annonce aérienne.

Finalement, nous redescendons vers les flots bleus pour un amerrissage bien plus doux que nombre d’atterrissage que j’ai eu l’occasion d’expérimenter. Le roulis des vagues nous ralentit rapidement, et l’avion retrouve un rythme de croisière pour s’approcher des quais.

En descendant de l’hydravion, nous sommes presque étourdis. Puis l’appétit arrive vite, après avoir survolé une région à ce point renommée pour ses poissons et ses produits frais.

Heureusement, Setouchi Seaplanes répond également à ce dernier besoin.

En plus de son restaurant excellent, Sofu Pasta & Cafe, situé immédiatement dans l’immeuble de la startup, un stand de hot-dog plus que satisfaisant se trouve sur la promenade avoisinante.

Sirotant un soda citronné en regardant au-delà des vagues, il ne manque plus que quelqu’un qui chanterait Le temps des Cerises accompagné d’un piano pour s’imaginer dans l’Hôtel Adriano, celui où déjeune Porco Rosso, ici au cœur du Japon.

Texte et photographies de Peter Chordas