Histoire

Le temple Engyo-ji – Expérience zen sur le mont Shosha

Le temple Engyo-ji – Expérience zen sur le mont Shosha

À un saut de bus puis une rapide ascension en téléphérique de la gare de Himeji, l’élégant mont Shosha est couvert d’un mélange éclectique de bâtiments shinto et bouddhistes. Bien que reconnu comme centre important du bouddhisme depuis 966, le nom Engyo-ji correspond en fait à l’ensemble de la montagne et des différents sites de dévotion.

Des vues imprenables sur les alentours naturels pendant la montée.

Le Dai-ko-do a une histoire riche comme lieu d'enseignement et de méditation.

Les bâtiments du temple sont plongés dans la nature, ce qui renforce encore leur sérénité.

L'explosion des couleurs automnales est un festin pour les yeux.

Le complexe du temple possède un grand espace pour se reposer et se rassénérer.

Un plat réconfortant de nouilles soba.

Envoyé en reportage dans la flore de la préfecture de Hyogo, ce n’est que maintenant que je commence à réaliser la chance qui est la mienne, à l’occasion de cette escapade au timing parfait. L’endroit est définitivement parfait pour échapper au rythme effréné de la ville, et je me demande déjà ce que je vais vivre sur la montagne.

Dans la cabine du téléphérique, les explications de l’opérateur se perdent dans le brouhaha ambiant. Ce qui ne me dérange pas, car je préfère m’égarer dans la contemplation de la forêt en contrebas et de sa flore. Aux chants des oiseaux succèdent un éclair de pelage, dans une brèche du feuillage. Après le passage de ce petit cerf japonais, nous arrivons au sommet.

Je suis désormais Shunyu Kaneko sur un chemin de bois menant à une zone à l’accès réservé. Le steward du temple, affilié aux affaires générales, me précède dans un grand bâtiment de bois en faisant glisser des portes coulissantes. Une architecture vieille de 500 ans, après qu’un incendie ait réduit en cendre la structure originale.

En passant une autre porte, je me retrouve face à face avec un Bouddha d’or, géant, assis dans une position de méditation. La lumière naturelle l’éclaire par de petites ouvertures carrés dans la maille des fenêtres, ainsi que par la porte restée ouverte derrière nous.

« Le Bouddha est au centre afin que les gens puissent s’asseoir en cercle autour pendant la méditation », m’explique Kaneko. Je suis escorté le temps d’une boucle autour de la présence sacrée, dont l’or irradie dans l’obscurité – appelant à lui toute la lumière qui entre dans la pièce.

Tout en me montrant un coussin disposé sur le sol de bois, Kaneko me demande si j’aimerais commencer maintenant mon initiation à la méditation zen. De façon intéressante, tous ceux à qui j’ai parlé de cette expérience m’ont prévenu qu’il fallait que je m’attende à recevoir des coups sur les épaules de la part du moine, dans l’hypothèse où ma tête perdrait sa concentration.

Mais il n’en a rien été. Toute l’initiation n’a consisté qu’en une prise de conscience de ma posture et de ma respiration. Aucune simulation extérieure, mis à part le son du vent dans les feuilles, les voix de retraités en visite à l’extérieur, et le jeu de la lumière sur le sol de bois usé, devant moi.

Après que l’on m’ait expliqué comment m’asseoir – jambes croisées, mains posées sur mes genoux, légèrement penchées vers l’avant et le regard vers le sol (autrement dit, l’exacte réplique de la statue devant moi), j’étais prêt à commencer. Le bruit de deux pièces de bois frappées entre elles annonçant le début de la séance.

Les quelques premières respirations profondes sont interrompues de longues pauses entre expiration et inspiration, puis je trouve rapidement un rythme régulier. Bien qu’un peu tendu à l’idée de bien respecter la pose et la respiration, je finis par me détendre en respirant régulièrement par le nez.

Puis, mon attention se porte progressivement du parquet qui s’étend devant moi aux rayons de lumière qui entrent dans la pièce par l’encadrement de la porte.

Concentré sur ma position et ma respiration, mes yeux commencent à devenir humides. Quelques minutes supplémentaires, puis les larmes commencent à déferler sur mes joues – bien que je reste calme. Je garde le cap, sans vraiment comprendre ce qui se passe. D’où viennent-elles ? Bien sûr, elles sont généralement associées à la tristesse, et je commence à ressasser mon historique émotionnel, plutôt chargé, des sept dernières années. Mais je décide que ces pleurs sont plus à observer qu’à comprendre.

Kaneko entrechoque à nouveau les pièces de bois et sonne un carillon, me permettant enfin d’essuyer l’eau salée de mes yeux et de mon visage. Pas de paroles.

Pas vraiment sûr que le moine ait vu mes larmes, je m’interroge si les gens doivent évoquer leur expérience une fois celle-ci achevée. Apparemment pas. Après avoir quitté la pièce sombre et croisé à nouveau l’immense statue, nous marchons vers le sommet. Kaneko est content d’entendre mon ressenti sur la méditation, alors que je questionne finalement ce que mes larmes pourraient, ou non, révéler.

En continuant de marcher, je réalise que la plupart des visiteurs ne s’aventurent pas jusque-là. Entouré d’arbre d’où s’interpellent les oiseaux, je ne peux penser à autre chose qu’à mon envie de justement m’éloigner des autres visiteurs. Mon désir de me plonger dans la nature automnale est puissant. En quittant le sentier, les pieds dans les feuilles tombées, notre conversation s’oriente sur le type de gens qui fréquente les bois calmes de la montagne. Je me retrouve plonger encore plus en avant dans l’introspection.

Alors que nous descendons le chemin ardu, je repense à un autre moment de la conversation, quand nous évoquions les chouettes, cerfs, sangliers et écureuils volants, ce qui me permet de réaliser que j’ai arrêté de chercher leurs traces depuis maintenant bien longtemps. Je suis plongé dans mes pensées, ressassant mon moment de silence avec le Bouddha d’or. Je ressens un besoin pressant de revenir au temple pour y passer cette fois la nuit – mais je n’en suis pas même encore parti.

Texte et photographies de Julian Littler

DESTINATION LIÉE

Hyogo

La préfecture de Hyogo se trouve approximativement au centre de l’archipel du Japon. Elle possède le port de Kobe qui joue un rôle important comme porte d’entrée du Japon. Elle est également dotée de nombreux sites touristiques comme le Château de Himeji, classé patrimoine mondial par l’UNESCO et plusieurs régions de sources chaudes onsen. Le boeuf de Kobe, une des trois grandes marques de boeuf japonais wagyu, est un de ses délices.