Histoire

Le sanctuaire d'Oyamazumi-jinja – Le plus grand trésor samouraï du Japon

Le sanctuaire d'Oyamazumi-jinja – Le plus grand trésor samouraï du Japon

Niché sur l’île calme d’Omishima, dans la mer intérieure de Seto, se trouve le sanctuaire d’Oyamazumi-jinja – un ancien site shinto, destination de pèlerinage pour les samouraïs pendant plus de 1400 ans.

Fondé en 594, le sanctuaire Oyamazumi-jinja est un lieu de vénération du frère aîné de la déesse solaire Amaterasu, Oyamazumi no Okami – une divinité des montagnes, des océans et de la guerre.

En conséquence, depuis des temps anciens, les guerriers ont visité Oyamazumi pour s’attirer le succès sur les champs de bataille. En cas de victoire, ils n’ont pas manqué de revenir offrir leurs armes et armures en remerciement.

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Ce n'est pas tous les jours que l'on peut franchir le torii d'un sanctuaire où sont passés tant de guerriers historiques.

À mon plus grand étonnement, les pièces exposées aujourd’hui dans le trésor du sanctuaire remontent au XXe siècle. Elles comprennent 80% des reliques samouraïs officiellement classées Trésors nationaux ou Biens culturels importants que l’on peut aujourd’hui trouver dans l’archipel. Certaines Odachi, les grandes épées, mesurent 180 centimètres pour près de cinq kilogrammes !

Bien que le sanctuaire ait parfaitement préservé toutes ces pièces inestimables, beaucoup présentent encore les marques des conflits violents pour lesquels leurs propriétaires étaient d’abord venus priés. Ce qui permet de réaliser que les armes et armures exposées dans le Homotsukan ne sont pas des reproductions. Derrière les vitrines, les lames brillantes, les casques intimidants et les miroirs de bronze ont appartenu aux grandes figures de l’histoire japonaise, comme Yoritomo Minamoto, le premier shogun, ou Tomoe Gozen, une femme samouraï du XIIe siècle.

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Les deux anciens camphres d'Oyamazumi, de 2600 et 3,000 ans, ont été les témoins de nombreux événements.

La trace d’une autre guerrière est aussi à découvrir dans les collections d’Oyamazumi – un ensemble de plaques faites pour s’adapter sur une taille fine et maintenue ensemble par du fil bleu, l’armure de Tsuruhime, une guerrière souvent décrite comme l’équivalente japonaise de Jeanne d’Arc.

Née en 1526, Tsuruhime est la fille du grand prêtre d’Oyamazumi-jinja. Ses deux grands frères sont déjà tombés au combat, en défendant Omishima contre le clan Ouchi, quand son père décéda de maladie en 1541. La gestion du temple repose alors sur ses épaules, à tout juste 15 ans – le moment choisi par le clan ennemi pour fomenter une invasion.

Entraînée aux arts martiaux depuis son enfance, Tsuruhime prend la tête des forces d’Omishima, ne se proclamant pas seulement grande prêtresse mais bien incarnation du dieu de la guerre du sanctuaire, Oyamazumi no Okami. Après une bataille féroce, Tsuruhime et son armée mettent en déroute le clan Ouchi, et les forcent à reprendre la mer.

Quand le clan Ouchi réessaie de conquérir l’île quatre mois plus tard, il se heurte au rempart insurmontable que représente cette jeune fille de 15 ans. D’après la légende, la flotte de Tsuruhime rencontre les navires Ouchi en pleine mer, avec Tsuruhime elle-même dirigeant les manœuvres d’abordage. Une fois à bord des navires ennemis, elle défie directement le général Takakoto Ohara, qui mène les forces du clan rival, en combat singulier.

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Un alignement impressionnant de barils de saké et d'anciennes photographies occupe la cour intérieure d'Oyamazumi.

Toujours d’après la légende, les mots dédaigneux qu’adressa Ohara à Tsuruhime étaient peut-être coupants, mais pas autant que l’épée avec laquelle la jeune fille l’acheva. Pour bien ponctuer sa réponse, Tsuruhime demanda à ses forces de lancer une salve de grenades horokubiya en direction des navires Ouchi, les repoussant à nouveau vers Honshu.

Durant deux ans, Tsuruhime réussit à défendre Omishima contre ses rivaux têtus de la grande île. Jusqu’à ce que son fiancé, comme ses frères plus tôt ne tomba à son tour sur le champ de bataille, poussant la jeune fille de 17 ans au suicide rituel – en se jetant à la mer.

Longtemps après que Tsuruhime ne mette fin à sa vie dans les eaux, une autre figure historique du Japon – dont le souvenir vit également au sanctuaire d’Oyamazumi-jinja Shrine – choisit la mer comme le lieu de sa renaissance, en quelques sortes.

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Le musée maritime d'Omishima Maritime dans le Oyamazumi-jinja abrite les découvertes marines faites par l'Empereur Hirohito, aux côtés de son navire.

Bien que le fait soit peu connu en dehors du Japon, l’Emperor Hirohito a passé une bonne partie de sa vie comme biologiste marin. Son navire, le Hayama Maru, et de nombreux spécimens marins découverts pendant ses voyages dans la mer intérieure de Seto, sont exposés au musée maritime d’Omishima dans le sanctuaire d’Oyamazumi-jinja.

Avec un ticket d’entrée à 1000 yen pour les différents musées du sanctuaire, celui-ci est en revanche gratuit, et offre déjà beaucoup à voir.

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Les gardiens de la porte d'Oyamazumi sont debout en armure, prêts au combat – un indice du passé martial des lieux.

Pour commencer, les statues encadrant la porte principale, plutôt que d’être tranquillement assises, sont debout et prêtes au combat, avec une armure. Un autre indice du passé martial des lieux.

De plus, près de 200 camphres âgés sont à découvrir autour du sanctuaire, dont deux honorables anciens de respectivement 2600 et 3000 ans, qui sont entourés des cordes sacrées shimenawa.

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Les cordes sacrés Shimenawa, comme celles qui entourent le camphre millénaire, sont l'une des pratiques shinto pour respecter les divinités qui habitent toutes choses.

Le Gohonden, le bâtiment principal, reconstruit en 1378 après un feu d’origine guerrière, est un bon exemple d’architecture nagare-zukuri. Sous un toit d’écorce de cyprès, les bas-reliefs de bois sont de belles fleurs qui habillent les poutres du sanctuaire.

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De nombreuses décorations raffinées sont à découvrir dans le sanctuaire, à l'image de ces lanternes.

Au fil des générations, le sanctuaire Oyamazumi-jinja a été tellement sacralisé par la famille impériale que, arrivé à la période Nara, des sanctuaires annexes avaient été ouverts dans tout l’archipel. Il est aujourd’hui le seul sanctuaire principal, à la tête de nombreux autres, de l’île de Shikoku.

Si vous recherchez un moyen de plonger dans le passé samouraï du Japon, le sanctuaire Oyamazumi-jinja saura totalement vous satisfaire.

Texte et Photographies de Peter Chordas

DESTINATION LIÉE

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La région de Ehime possède l’autoroute Nishiseto, une des plus grandes pistes cyclables du Japon et elle est connue des cyclistes du monde entier. Ehime est dotée de nombreux endroits où les visiteurs peuvent rencontrer l’histoire, dont Dogo Onsen, une source chaude dont l’histoire remonte à plus de 3.000 ans et les rues uchiko, restées inchangées depuis les périodes Edo et Meiji.